autour de la Faille de Nîmes le 14 juin 2025

Dômes de Suzette , Chateauneuf du Pape, Dentelles de Montmirail etc…

Une vingtaine de braves est venue affronter la chaleur de la mi-juin en Vaucluse pour faire ce circuit rendu ré-agréable par la climatisation des voitures. L’intérêt géologique de la sortie était complété par la richesse patrimoniale des sites visités.
Heureusement les participants étaient d’excellente composition et ont accepté sans protester que les lectures de paysage fassent largement appel à leur imagination : la visibilité était très mauvaise à cause de l’obscurcissement du ciel lié aux émissions de cendres par les incendies au Canada ou de sables fins venus du Sahara.

Le mont Ventoux se voyait à peine et pareil pour les Dentelles de Montmirail. Le spectacle sublime qu’on a normalement de ces deux montagnes symboliques du comtat Venaissin était complétement gommé. Ceci fût largement compensé par la qualité des exposés et des sites visités.

programme en pdf

 

groupe SGA devant le chateau du Barroux

Itinéraire de la sortie (en cliquant sur le lien ci contre qui pointe sur le Géoportail : il est possible sur un PC d’afficher l’itinéraire sur la carte géologique. Il convient, si nécessaire, de charger le fond de carte « Cartes Géologiques » et de le positionner au dessous du tracé de l’itinéraire « Iti SGA 250614 »)

Chateau du Barroux :

Comme exposé en préambule la lecture du paysage comtadin depuis la terrasse fut un peu contrarié par la visibilité. Ceci n’a pas empéché l’évocation de l’histoire géologique locale depuis le Trias jusqu’à nos jours. Les ouvertures et fermeture de la Thetis accompagnées des périodes d’envahissements marins et de larges périodes d’émersion ont fourni les éléments essentiels du paysage modelé par la tectonique alpine à l’origine du Ventoux et le diapirisme du dôme de Suzette enraciné sur la faille de Nîmes.

Le château du Barroux est le repère anthropique essentiel du Comtat. Sa haute silhouette blanche à l’allure médiévale se voit de partout. Les murailles sont à peine égayées de quelques fenêtres à meneaux de la Renaissance.

Il est bien ruiné au début du 20éme siècle  mais « depuis 1929 et aujourd’hui encore, la famille Vayson de Pradenne rénove le bâtiment » . Aujourd’hui Jean-Baptiste et son épouse Fanny ont entrepris courageusement de poursuivre la restauration et surtout de faire vivre le Château en organisant visites et animations et en installant une distillerie de Whisky à base de base de petit épeautre de Haute-Provence, dont les premiéres bouteilles seront commercialisées en octobre 2025.

cour du chateau du Barroux

C’est la fabuleuse exposition de fossiles qui a le plus retenu l’attention des participants . Les murs d’ammonites , les squelettes meublant les antiques pièces , tous ceux-ci merveilleusement et artistiquement présentés ont dû faire naitre déjà beaucoup de vocations ou des regrets de n’avoir pas assez étudié la paléontologie. Impossible dans ce bref compte-rendu de décrire toutes ces émotions.

Sculpture en métal de squelette d'ichtyosaure
Ammonites préparées par Luc Ebbo

La collection Luc Ebbo est en grande partie issue du bassin vocontien . Les roches s’y sont majoritairement formées au cours du Crétacé, période du plus haut niveau marin de tous les temps, il y a environ 100 millions d’années.
Les ammonites s’y trouvent en abondance, les habitants de la région et les amateurs de paléontologie s’y succèdent depuis plus de 150 ans à la recherche de ces témoins du passé.

Ammonite déroulée Crioceras nolani Hauterivien de haute Provence




fossiles préparés par Luc Ebbo

Carriéres de pierres burdigalienne du Pré Fantasti :

Si le village et le Château du Barroux sont en terrains jurassiques On trouve juste à coté une belle formation miocène ( burdigalien ) Après une longue émersion à la fin de l’ère secondaire une transgression majeure fait pénétrer la mer en suivant le sillon rhodanien et contournant les Alpes jusqu’en Autriche.
Ces grès calcaires souvent coquillers sont exploités un peu partout pour fournir des pierres de taille.

Bien sûr chaque village a « la meilleure pierre » ! Celle où nous arrétons était réputé pour la fourniture de « bards » , c’est-à-dire de dalles pour le sol . Exploitée déjà par les romains à ciel-ouvert ou en souterrain elles sont arrétées au 20éme siècle.
A coté de la carriére et construit en partie en molasse locale nous avons pu voir la ruine du Pré Fantasti. Cette batisse construite par deux frères alchimistes : des Barberini , sent encore le soufre, si on y prète attention et on a un peu d’imagination.

SGA dans carrière molasse
lac du Paty

Lac du Paty :

On trouve a s’installer confortablement pour le pique-nique au bord du lac qui se trouve sur la commune de Caromb Malheureusement la buvette n’ouvrira que plus tard dans la saison.
Nous sommes rejoint par Pierre Michelier , le responsable du suivi et de l’entretien du barrage du Paty. On ne doit pas dire barrage mais « écluse » car l’ouvrage fût construit entre 1764 et 1766.
C’est le deuxième plus ancien barrage de France .
Mais lors de sa construction , le Comtat n’est pas en France et la technique constructive diffère sensiblement ; en France, on enserre entre deux gros murs en pierre de taille un béton cyclopéen : des blocs de pierre dans lesquels on coule la chaux. Au Paty on ne coule pas de chaux et le remplissage reste bien perméable. Des drainages sont installés pour évacuer d’éventuelles infiltrations. 

Lors de consolidations entreprises en 1970 cette particularité n’a pas été prise en compte et le renforcement mis en place géne le drainage. Ceci a contribué à fragiliser encore plus le barrage et pour assurer la sécurité le ministère de l’agriculture, qui a l’ouvrage sous sa tutelle, a envisagé de le détruire. Une solution de confortement a finalement été proposée, mais elle se heurte encore à quelques obstacles dressés par l’étude d’impact environnemental. Nul doute pourtant que les batraciens partagent avec les carombais le désir de conserver le lac.
En attendant le niveau du lac a été abaissé de 4m . Il reste tout de même 17m d’eau, ce qui permet aux jeunes ados de sauter avec joie, mais en toute illégalité depuis le bord de l’écluse.
Du point de vue géologique, le barrage est installé à l’entrée d’une petite gorge dans le calcaire tithonien. Cette gorge existait déjà au miocène et fut surcreusée pendant la crise messinienne.
L’eau alimentant le lac est celle fournie par le bassin versant. Une belle résurgence karstique existe quelques mètres plus bas qui alimente encore aujourd’hui le village en eau potable . L’eau est potable sans traitement malgré l’existence de troupeaux dans le Ventoux. Par précaution un traitement ultraviolet a été mis en place complété par une chloration pour se conformer à la réglementation.

"ecluse" du Paty

Paysage Dôme de Suzette :

Malgré la mauvaise visibilité on pouvait contempler les dentelles de Montmirail et les lames tithoniennes verticalisées en bordure du dôme.

Francois Roure, nous expose les mécanismes du diapirisme et l’histoire géologique que révéle la géophysique : les mouvements du Moho et les traces laissées par ces mouvement. Il démontre par ses coupes que des accidents tectoniques qui nous paraissent grandioses ; comme le synclinal de Saou, ne sont aux yeux du géophysicien , que superficiels .
En spécialiste pétrolier il montre sur chaque coupe les endroits où il faudrait forer car le piége à hydrocarbures a fonctionné très longtemps à l’abri des attaques hydrauliques.
Et bien sûr, il nous expose le fonctionnement de la faille de Nîmes.
Un grand moment d’érudition.

François Roure au col de la chaine

Saline de Courthézon Chateauneuf
Plutôt que d’aller sur le site de l’Espace Naturel Sensible de l’Etang salé à Courthézon, nous allons voir deux fronts de carriéres de molasse burdigalienne autour de la dépression saline.

Molasse Miocène lac salé de Courthézon
Molasse Miocène stratifications entrecroisées
Textes et liens Philippe CHEVALLIER,
photographies Daniel NARDIN